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Par Carenews INFO - Publié le 30 avril 2025 - 18:16 - Mise à jour le 30 avril 2025 - 18:32 - Ecrit par : Camille Dorival
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À l’issue de la Conférence des financeurs de l’ESS, des impressions mitigées

Ce mardi 29 avril, le ministère de l’Économie et des Finances a convoqué la première réunion de la Conférence des financeurs de l’ESS annoncée depuis plusieurs mois. Parmi la soixantaine de participants, les représentants de l’ESS en sont ressortis avec des avis prudents et des attentes fortes pour la suite.

Réunie au ministère de l'Économie et des Finances, la Conférence des financeurs de l'ESS s'est tenue le 29 avril. Crédit : Carenews.
Réunie au ministère de l'Économie et des Finances, la Conférence des financeurs de l'ESS s'est tenue le 29 avril. Crédit : Carenews.

 

 

« Il faut saluer cette initiative », se réjouit Antoine Détourné, délégué général d’ESS France, au lendemain de la première réunion de la Conférence des financeurs de l’économie sociale et solidaire (ESS), qui s’est tenue à Bercy le mardi 29 avril. L’événement a réuni une soixantaine de participants – réseaux de l’ESS, fonds d’investissement, banques publiques, investisseurs institutionnels, collectivités territoriales et parlementaires – en présence de deux ministres : Éric Lombard, le ministre de l’Économie et des Finances, et Véronique Louwagie, la ministre déléguée en charge de l’ESS.  

 

Un état des lieux des freins et besoins de financement

 

L’objectif de cette première réunion : faire un état des lieux des freins et des besoins de l’ESS en matière de financement, en présence des différents acteurs publics et privés concernés par cette question.

« L’ESS est une forme d’économie que je trouve très moderne puisque c’est une économie de solidarité, d’inclusion, dont le rapport au partage n’est pas le même que celui du reste de l’économie. Le fait d’appuyer son développement fait partie des missions importantes que nous nous sommes fixées », a ainsi expliqué Éric Lombard juste avant la tenue de la conférence. « Je souhaite créer des liens entre l’économie conventionnelle et l’ESS, et cette conférence des financeurs va y participer. Elle va également nourrir la Stratégie nationale de l’ESS qui sera présentée en fin d’année », a ajouté Véronique Louwagie.

Lors de cette première réunion, une quinzaine de représentants de l’ESS et financeurs privés et publics ont été invités à prendre la parole les uns après les autres. « C’est une vraie satisfaction que ce sujet soit enfin pris au sérieux, et que toutes les parties prenantes soient réunies pour en parler. Nous réclamons cela depuis des années », note Antoine Détourné.

 

Un manque d’éléments concrets

 

Au sortir de la conférence, toutefois les avis sont mitigés. Sur Linkedin, David Cluzeau, le président de l’Union des employeurs de l’ESS (Udes), se « félicite que certaines prises de conscience avancent, notamment : la réforme attendue de la taxe sur les salaires, un impôt du siècle dernier qui pénalise nos modèles d'avenir ; la création d'une prime innovation sociale, pour valoriser et accompagner les projets portés par nos employeurs engagés ; la nécessité de mesurer et rendre possibles les investissements nécessaires dans le développement de nos projets innovants, en proximité des territoires et des citoyens ».

Jean-Luc Gleyze, vice-président de l’Assemblée des départements de France (ADF), indique quant à lui sortir de la conférence « dubitatif » : « j’ai porté la parole de l’ADF parmi beaucoup d’acteurs qui se sont exprimés dans un timing serré pour un état des lieux du sujet, mais rien de vraiment concret à l’issue, à l’exception d’une nouvelle rencontre à venir », écrit-il sur Linkedin.

« Il n’y a eu aucune annonce faite lors de la réunion, et nous manquons d’informations claires sur la méthode qui va être adoptée pour poursuivre », confirme Bastien Sibille, secrétaire général de Coop FR. Celui-ci est également président de l’opération Milliard,  à l’origine d’une tribune récente qui demande aux pouvoirs publics de mieux garantir les investissements faits dans les initiatives liées à la transition juste, souvent portées par des acteurs de l’ESS.

« Je reste sur ma faim », estime de même Fatima Bellaredj, déléguée générale de la Confédération générale des Scop et Scic (CG Scop). « Certains sujets pourtant essentiels, comme le soutien à la reprise et transmission des entreprises sous forme de Scop, ont à peine été évoqués ; d’autres, comme le développement des titres participatifs, qui permettent d’investir dans les Scop et Scic, n’ont même pas été nommés », regrette-t-elle.

 

Nourrir la stratégie nationale de l’ESS

 

« Cette réunion a été un premier pas, il faut maintenant faire le second », note Antoine Détourné. « Pour l’instant, nous n’avons reçu que des engagements de travail. Mais nous allons faire des propositions concrètes pour que la stratégie nationale de l’ESS comporte des mesures structurelles sur le financement. »

Le délégué général d’ESS France souligne l’importance de travailler sur la question des ressources de fonctionnement des structures de l’ESS, et notamment celles des associations, dont un grand nombre souffre des coupes budgétaires de l’État et des collectivités en 2025. « Nous avons besoin d’y voir plus clair sur les ressources de ces acteurs, d’avoir une vision d’ensemble, et aussi de pouvoir estimer par exemple l’impact de la baisse des dotations aux collectivités sur ces structures, de même que l’impact de la baisse des contrats aidés. Pour l’instant, il n’y a pas de données publiques qui permettent de l’évaluer. »

 


À lire aussi : Les associations alertent sur leur situation budgétaire 


 

Lors de la conférence des financeurs, Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif, a de même insisté sur deux points : la nécessité de privilégier la subvention plutôt que la commande publique pour les associations d’intérêt général – qui bien souvent remplissent des mission de service public, rendant des services aux populations qui sans elles ne seraient pas couverts –, afin de sécuriser leurs financements, comme le préconisait un récent rapport du Conseil économique, social et environnemental ; et l’importance de résoudre les difficultés de trésorerie de ces structures, en réduisant les délais de paiement des financements publics, parfois versés avec un an de retard.  

Autre sujet essentiel, pour Antoine Détourné : pouvoir évaluer les besoins d'investissements de l’ESS, et être en mesure d'y répondre. « Le secteur lucratif accède très facilement aux investisseurs, car il rémunère le capital, et c’est ce qui explique en grande partie les parts de marchés qu’il gagne progressivement, explique-t-il. Côté ESS, nous ne rémunérons pas ou très peu notre capital. Nous devons donc avoir une stratégie de "capital patient" pour pourvoir aller chercher des investisseurs sur des secteurs tels que la transition écologique, la santé, l’éducation… »

 

Une nouvelle plénière après l’été

 

Prochaines étapes, selon les indications données par le ministère à l’issue de la réunion : début mai, le lancement d’un « travail technique avec les acteurs et les administrations, pour proposer et expertiser des solutions visant à lever les freins identifiés » ; puis « après l’été 2025 », la tenue d’une nouvelle réunion plénière « pour présenter les premières avancées collectives ». Les travaux de la conférence viendront nourrir la stratégie nationale de l’ESS, qui devrait être publiée en novembre.

« Nous appelons maintenant les pouvoirs publics à aller vite et à aller loin, souligne David Cluzeau sur Linkedin. L'ESS n'est pas un secteur accessoire : c’est à la fois l’économie et la cohésion sociale d'aujourd'hui et de demain. Il faut donc passer des convictions d'ambiance à des réalisations significatives, faire plus encore et que cette conférence des financeurs, dans un horizon court, devienne celle des décisions et de l'affectation des moyens à une stratégie ambitieuse de l'ESS telle que nous la dessinerons à l'automne. »

 

Camille Dorival 

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